CUI : l’Administration préfère payer des frais d’avocats pour couvrir ses turpitudes plutôt que de se donner les moyens de respecter ses obligations et d’offrir les formations d’insertion

mercredi 21 mai 2014
par  Snes S3 MRP

De nombreux S1 nous ont alertés sur une convention d’adhésion à un groupement de commandes concernant les frais d’avocats dans le cadre de contentieux avec les CUI, proposée au vote des CA portant sur la répartition de DHG ou sur le compte financier.

Les CUI (contrat unique d’insertion) sont des contrats précaires de droit privé créés en 2008 : de trois ans renouvelables une fois, ils sont proposés notamment dans le cadre de l’aide aux élèves handicapés mais aussi pour la surveillance et l’accueil des élèves ou pour des tâches administratives, et sont financés en partie par les ministères du travail ou de la cohésion sociale.

Le SNES-FSU s’est opposé à la création de ces contrats : sous couvert de permettre une insertion professionnelle, il imposent en réalité aux personnels concernés une précarité extrême, des temps partiels (et la rémunération afférente !) le plus souvent non choisis et une faible rémunération, pour des tâches qui devraient être assurées par des fonctionnaires titulaires protégés par un régime statutaire. Les personnels relevant de contrat CUI sont souvent méconnus dans les établissements et les collègues titulaires ignorent le détail de leurs conditions de travail, alors que beaucoup n’ont servi qu’à cacher la misère des moyens donnés aux vies scolaires.

L’article L. 322-4-12 de la loi qui fixe les modalités de recrutement des CUI précise que « ce contrat prévoit obligatoirement des actions de formation et d’accompagnement au profit de son titulaire, qui peuvent être menées pendant le temps de travail et en dehors de celui-ci. Il ouvre droit à une attestation de compétences délivrée par l’employeur et il est pris en compte au titre de l’expérience requise pour la validation des acquis de l’expérience... ». Or, nombreux sont les établissements scolaires qui n’ont pas satisfait cette exigence, et des CUI lésés, voyant leurs contrats s’achever sans avoir pu bénéficier d’aucune formation préparant la suite de leur activité professionnelle, ont fort légitimement porté leur cas devant les prud’hommes et obtenu la condamnation des chefs d’établissement, en tant que représentants de l’EPLE employeur.

Devant la multiplication de ces recours juridiques, l’Administration, plutôt que de s’interroger sur la nécessité de recruter davantage d’agents titulaires répondant à des besoins réels du service public d’éducation, préfère organiser la défense des personnels de direction, et la prise en charge financière des procès. C’est dans cet esprit que le Rectorat de Versailles envisage à l’heure actuelle la création d’un groupement de commandes qui permettrait aux EPLE de se voir rembourser les frais d’avocat par le biais d’une subvention versée a posteriori au budget des établissements.

Ce procédé est scandaleux, tant sur le fond que sur la forme :

  • les CA à l’ordre du jour desquels cette question a été portée n’ont pas eu connaissance du texte de la convention, puisqu’il s’agit d’adhérer à un groupement de commandes qui n’est pour l’instant qu’un projet et que la convention en elle-même n’a pas encore été rédigée. Il est donc demandé aux élus d’engager la responsabilité du CA et donc de l’établissement, en se prononçant sur un texte qui n’existe pas encore ! C’est signer un chèque un blanc sans pouvoir en contrôler les conséquences...
  • les élus au CA sont supposés engager ainsi des mouvements sur le compte de l’EPLE, alors qu’ils sont garants du budget et du compte financier, pour des contrats sur lesquels ils ne sont à aucun moment consultés, ni au moment du recrutement, ni pour le suivi de la formation proposée.
  • les chefs d’établissement bénéficient comme tout fonctionnaire de la protection juridique accordée par l’Etat-employeur, et aucun de ceux qui ont soumis l’adhésion au dispositif au vote de leur CA n’a, à notre connaissance, été en mesure d’expliquer pour quelle raison un dispositif particulier était nécessaire.
  • enfin, qu’en est-il de la défense et du soutien financier apportés aux CUI forcés de demander justice devant les prud’hommes suite au non-respect de la loi par leurs employeurs ? Il s’agit d’une conception du service public bien curieuse et bien inégalitaire, à laquelle le SNES-FSU ne peut souscrire !

Au delà de la manipulation des élus au CA qui a ainsi été pratiquée, l’attitude du Rectorat est inadmissible : le principe même de ce groupement de commandes n’a jamais été évoqué en CTA et l’Administration s’est bien gardée de consulter les organisations syndicales à ce sujet.
Le SNES-FSU demandera à ce que ce point soit mis à l’ordre du jour du prochain CTA et sera extrêmement vigilant sur le contenu de la convention à venir. Si l’Administration veut éviter les condamnations en justice, la première chose à faire est de respecter la loi.