Les vertiges du tout-numérique : la région IDF persiste et signe

Des écrans numériques imposés au forceps dans les lycées de l’académie
lundi 28 novembre 2022
par  Secteur politique éducative

La région Ile-de-France a imposé l’utilisation des manuels numériques dans les lycées professionnels, tout en incitant les lycées généraux et technologiques à faire de même. Elle veut maintenant généraliser l’utilisation d’écrans tactiles numériques en « forçant la main » aux lycées.

Depuis la rentrée 2019, la région Île-de-France s’est lancée dans une politique du numérique « à outrance » s’accrochant à l’idée dépassée des vertus incommensurables de l’usage du numérique dans les enseignements.
La première mesure a été l’imposition des manuels numériques dans les lycées professionnels, alors que les lycées généraux et technologiques conservaient le choix de conserver les manuels papiers traditionnels. Le SNES-FSU avait déjà dénoncé cette politique du tout numérique et la majorité des LGT de l’Académie de Versailles a refusé le passage aux manuels numériques.
Et ces lycées ont eu raison car tous les retours montrent que l’usage des manuels numériques est insatisfaisant : il implique que les ordinateurs soient amenés par les élèves et chargés, que les connexions soient efficaces, ce qui ne se réalise évidemment pas à chaque fois. De facto, de nombreux collègues en sont réduits à avoir recours à la photocopie pour pallier à ces problèmes récurrents.

Finalement un coût important, comme l’équipement en ordinateurs de tous les élèves et l’achat de licences pour l’usage de manuels numériques, entraine un surcoût : celui de la photocopie en masse.

 Le mirage du « tout numérique » continue d’envoûter la région IDF

Sans avoir fait aucun bilan sérieux de trois ans d’usage des manuels numériques et sans jamais avoir consulté les personnels enseignants, la région IDF poursuit sa fuite en avant. Après avoir fait un bilan dithyrambique de son action dans ce domaine sombrant dans la plus risible autocélébration dans son dossier de presse, la région veut maintenant généraliser l’usage des écrans numériques tactiles dans les salles de classe.

Fidèle à ses habitudes autoritaires, la région met devant le fait accompli les personnels enseignants et leurs représentants syndicaux qui n’ont absolument pas été consultés. Dorénavant les vidéos projecteurs traditionnels ne seront plus financés par la région et devront être achetés ou entretenus sur leurs fonds propres par les établissements. Les dotations de la région ne pourront servir que pour acheter ces fameux écrans tactiles interactifs. Voilà une nouvelle manière de « forcer la main » aux établissements et aux enseignants.

 De nombreuses objections à faire

Le SNES-FSU en remet pas en question les qualités de ces écrans tactiles interactifs qui peuvent effectivement enrichir la pratique professionnelle des collègues. Toutefois, ils posent un certain nombre de problèmes non négligeables :

  • leur prix qui, pose inclue, peut atteindre les 8 000 euros. La région ne communique pas clairement sur le prix de l’achat et de leur pose mais alors que le bâti souffre de vieillissement et de vétusté dans notre académie, il y a tout lieu de s’interroger sur ce choix d’allocation de fonds ;
  • leur coût énergétique et leur entretien. Très gourmand en électricité dans un contexte d’inflation des coûts énergiques, les généraliser c’est entrainer un surcoût de facture énergique pour le fonctionnement des lycées. C’est évidemment totalement à l’encontre de la politique de sobriété énergétique prônée aujourd’hui (et que l’on enseigne en classe !).
    Matériel plus sophistiqué que les vidéoprojecteurs traditionnels, les écrans tactiles tomberont évidemment plus souvent en panne et seront beaucoup plus compliqués, longs et coûteux à réparer. Dans ce cas ils constitueront un « poids mort » dans une classe puisqu’ils ne peuvent même pas être utilisés comme tableau blanc de substitution.
    Les traditionnels vidéoprojecteurs sont beaucoup plus fiables et moins coûteux ; leur gestion peut être organisée dans les établissements ce qui ne sera pas le cas des nouveaux écrans tactiles qui impliquera le recours à une maintenance qui grèvera le budget de la région et qui imposera vraisemblablement des délais importants pour que les équipes de réparation passent.

Si toutes ces contraintes étaient compensées par un accroissement significatif de l’efficacité pédagogique octroyée par ce matériel… mais ce n’est absolument pas établi. L’écran tactile numérique est un outil qu’il n’y a pas lieu de mépriser, mais il n’est pas du tout une panacée pédagogique tout comme les manuels numériques ne l’étaient non plus d’ailleurs.

Fuite en avant, refus d’esquisser toute forme de retour critique, stratégie de communication creuse, effets d’annonce clinquants… tous ces motifs sont à l’origine d’une décision qu’il faut refuser et notamment dans les lycées. Le SNES-FSU incite à la plus grande vigilance sur ce point et à intervenir éventuellement au CA en proposant une motion.

Exemple de motion proposée au lycée Marie Curie Versailles


Documents joints

Motion ENI Marie Curie de Versailles