Bilan de la rentrée 2020 dans les collèges - Une nouvelle dégradation des conditions de travail !

samedi 10 octobre 2020
par  Snes S3 AT

« Bien préparée » et bien évidemment « réussie » malgré le contexte sanitaire, telle est la rentrée 2020 dont se vante Jean-Michel Blanquer.
Ce n’est malheureusement pas exactement l’image que nous renvoie l’enquête proposée par le SNES-FSU dans notre académie.

 LA SITUATION SANITAIRE

Dans beaucoup d’établissements, au port du masque près, la pré-rentrée s’est faite dans les conditions habituelles : réunion plénière dans une salle plus ou moins vaste et plus ou moins bien ventilée, conseils d’enseignement et même sympathique buffet, souvent dans l’oubli des distances de sécurité.
L’excellent bilan du DNB (encore meilleur qu’auparavant) a été dressé par des chefs d’établissement forcés de reconnaître l’effet miraculeux de l’examen local à 100 % contrôle continu. Il en est de même du bilan des passages en seconde générale et technologique.

Dans la plupart des cas, le chef d’établissement a présenté de manière succincte le protocole sanitaire, mais la communication reste floue sur les procédures à appliquer en cas de covid-19, pour les cas-contacts et au quotidien sur la manière dont il faut agir dans le cas d’un élève présentant des symptômes. Rappelons que certains établissements n’ont pas d’infirmier.

Il ressort avant tout de notre enquête qu’il existe à peu près autant d’interprétations du protocole que d’établissements :

  • Jusqu’à 15 masques en tissu distribués aux personnels, mais aucun dans certains établissements où les collègues on dû faire le siège de l’intendance pour finalement en obtenir deux. Deux masques grand public par élève ont été distribués par les conseils départementaux au moins dans le 78 et le 95 : masques de marque Dim (taille enfant) ou « bec de canard » garanti 10 lavages. Des masque de secours sont prévus en cas d’oubli ou de masque défectueux.
    Les masques chirurgicaux de type 2 pour les personnels à risque ont été distribués récemment (une ou plusieurs boîtes de 50).
  • La limitation des brassages d’élèves est à géométrie variable : classes « sédentarisées » ou non, sens de circulation dans les couloirs, zones réservées à certains niveaux dans la cour…
    Des collègues pointent l’inégalité de traitement entre les professeurs ayant gardé une salle fixe (sciences, musique, arts plastiques) et les autres, obligés de déménager à chaque heure avec tout leur matériel.
    La section syndicale SNES-FSU d’un collège du 95 a fait reculer sa direction sur ce point et permis que ce soient les élèves qui bougent.
  • Des distributeurs de gel hydroalcoolique et de désinfectant pour les surfaces sont placés parfois seulement à l’entrée du collège, parfois dans toutes les classes, pas toujours en salle des professeurs et parfois financés par les fonds propres des établissement (jusqu’à plusieurs milliers d’euros dans certains cas, au détriment des crédits pédagogiques).
    Le SNES-FSU Versailles demande à ce que les dépenses sanitaires faites par les établissements soient recréditées sur leurs fonds propres.
    On nous signale déjà des manques de réapprovisionnement en savon et en serviettes jetables pour les mains.
  • La désinfection des tables, sols, chaises et poignées de portes est loin d’être assurée partout et tous les jours, en particulier lorsque le conseil départemental sous-traite l’entretien à des entreprises privées en sous-effectifs chronique.
    Solution novatrice : dans un collège de l’Essonne, les collègues désinfectent eux-mêmes tables, chaises et poignées en fin de demi-journée. Le chef d’établissement et l’adjoint participent au nettoyage des tables de la cantine.
  • Les élèves sont parfois regroupés par classe à la cantine. Un collège du 78 parvient à les installer à des tables individuelles.
  • Aucun investissement ne semble avoir été engagé par les conseils départementaux pour améliorer l’équipement en sanitaires des collèges.
  • Les réunions parents-professeurs ont en général été maintenues, mais en admettant un seul parent (d’où des difficultés en cas de séparation conflictuelle) et en refusant les enfants.
  • L’aération préconisée dans le protocole sanitaire est problématique dans de nombreux collèges, les chefs d’établissement refusant le déblocage des fenêtres pour des raisons de sécurité. Avec les fortes chaleur, des malaises nous ont été signalés. Avec le froid qui arrive, cela sera également problématique.
  • En EPS, certains sports sont abandonnés, mais pas forcément de manière cohérente : plus de boxe ni de lutte, mais de l’acrosport maintenu…
  • Des interdictions diverses comme manger en salle des professeurs et utiliser les manuels dans les classes ont fleuri.
  • Dans le 78, il est question de mettre en place des dispositifs de prise de température à l’entrée du collège, sous la responsabilité de l’infirmier scolaire ou, en son absence, du chef d’établissement.

 DES EFFECTIFS EN HAUSSE, DES CLASSES SURCHARGÉES

Les DGH n’ont pas tenu compte de la poussée démographique dans les départements de la grande couronne. Les effectifs ont été sous-évalués, ce qui a donné lieu à des fermetures de postes et de classes. Quelques ouvertures cependant sont signalées en cas de situation vraiment critique, mais le plus souvent, ce sont quelques heures ajoutées à la DHG depuis juin.
On atteint presque partout 30 élèves par division, parfois plus, 26-28 en REP, 24-25 en REP+, et 30 pour certains groupes UPE2A. De plus, les effectifs très lourds des classes empêchent une inclusion satisfaisante.
On ne sait plus où caser tables et chaises sans bloquer les issues de secours.
Des établissements affichent complet et envisagent de refuser toute nouvelle inscription alors que les nouveaux élèves continuent à arriver.
On n’évoquera même pas l’aspect sanitaire, puisque selon le nouveau protocole on peut sans aucun danger entasser un à deux adultes (si AESH) et une trentaine d’adolescents dans des pièces de quarante à cinquante mètres carrés…
D’inutile, voire dangereux au printemps, le masque est devenu en septembre l’arme absolue capable de contrer à elle seule le virus.

Effectifs plus élevés que jamais et ventilation insuffisante, ce n’est pas ainsi qu’au SNES-FSU nous concevons une rentrée bien préparée !

 DES CLASSES SANS PROFESSEUR

Comme chaque année, des collègues ne sont pas remplacés alors même qu’il s’agit d’absences prévues ou connues de longue date : par exemple dans le 91 une collègue d’arts plastiques en congé maternité et un collègue en CLM depuis le printemps 2019.
Dans le 95, un BMP de mathématiques de 18h n’est pas pourvu et dans le 78 ce sont des BMP d’éducation musicale et de technologie qui restent vacants.
Cette année, les affectations des personnels contractuels ont été encore plus chaotiques et opaques que les années précédentes : postes vacants dans des établissements où sont rattachés plusieurs personnels dans la discipline, non respect des vœux et de l’ancienneté des personnels...
Le SNES-FSU Versailles intervient sur ces situations pour faire respecter les droits des personnels mais aussi la continuité du service public.

 UN SAUPOUDRAGE DES MOYENS

Les chefs d’établissement lancent des appels au volontariat pour consommer les HSE inutilisées depuis mars que le Ministère présente comme une manne généreusement octroyée pour aider les élèves mis en difficulté par le confinement.
Les élèves sont désignés par les PP de l’année précédente ou détectés grâce à des évaluations en mathématiques et français.
Partout les collèges s’organisent pour les évaluations de 6ème. Le dispositif « devoirs faits » est largement reconduit.
Pour le SNES-FSU, l’hypocrisie du Rectorat, qui se contente de redéployer sur les deux premiers mois de l’année les heures non utilisées pendant le confinement l’an dernier et présente cela comme des moyens supplémentaires pour rattraper les écarts scolaires et sociaux qui se sont creusés l’an dernier est inacceptable. Le SNES-FSU continue d’exiger des moyens à la hauteur des besoins pour l’Éducation Nationale, d’autant plus dans le contexte de crise sanitaire que nous vivons.

 LES HEURES SUPPLÉMENTAIRES

La situation est très variable. Certains collèges n’en ont pas ou très peu, alors que dans d’autres les collègues (surtout ceux en début de carrière) subissent des pressions pour en accepter au-delà des deux désormais imposables.
L’explosion du taux d’HSA dans les établissements continue de dégrader les conditions de travail des personnels, des élèves et la qualité de l’enseignement apporté aux élèves.

 LES MANUELS

La hausse des effectifs rend nécessaire des commandes de manuels supplémentaires.
Dans les collèges passés aux manuels numérique, on se heurte aux mêmes difficultés que pour l’enseignement à distance : équipement informatique insuffisant des familles, problèmes de connexion…

 LES HEURES DE VIE DE CLASSE

Les chefs d’établissements continuent de s’appuyer sur la circulaire de 2015 pour ne pas rémunérer les heures de vie de classe en rappelant que 10 sont obligatoires (mais pas toujours prévues à l’EDT). Certains surveillent que ces heures soient bien effectuées !

Le flou demeure sur les 12h d’accompagnement à l’orientation en 4ème et les 18h en 3ème. Les collègues ne disposent d’aucune information concrète à ce sujet.
Certains chefs d’établissements surveillent là-encore que ces heures soient bien effectuées.

 LE RETOUR DES DISPOSITIFS NON OBLIGATOIRES

Le coronavirus n’a pas eu raison du quart d’heure lecture ni de l’éloquence, qui reviennent en force, accompagnés des incontournables « journée de l’élégance et de la courtoisie », « semaine de la persévérance » et « semaine citoyenne ».
Ces dispositifs, dans le meilleur des cas, donnent lieu au paiement de quelques HSA ou à une IMP.
Les classes sans notes survivent dans quelques collèges.
Pour le SNES-FSU c’est aux personnels, dans le cadre de leur expertise pédagogique, d’envisager la mise en place de dispositifs particuliers. Ces derniers ne peuvent en aucun cas être imposés et remettre en cause la liberté pédagogique de chaque enseignant.

 RÉUNIONITE

Des réunions sont déjà planifiées pour la liaison école-collège et pour l’évaluation par compétences (dans le 91 par exemple).
Dans le 95, un chef d’établissement impose même d’ores et déjà des réunions le mercredi après-midi pour organiser l’enseignement à distance ou hybride en cas d’allègement des effectifs de l’établissement, voire de reconfinement.
Dans le 92 — encore mieux ! — c’est un samedi matin qui est prévu pour la rédaction du nouveau projet d’établissement.
Les premiers CA et conseils pédagogiques ont déjà eu lieu avec des ordres du jour très chargés.

 DES POSTES D’AESH NON POURVUS

Des élèves se trouvent encore sans AESH, certains postes restant non pourvus, peut-être par manque d’attractivité d’un métier aussi mal reconnu que rémunéré.
Dans le 78, des élèves sont contraints de travailler avec plusieurs AESH.
Il n’est pas rare par ailleurs qu’un AESH prennent en charge plusieurs élèves dans la même classe.

  ÉTAT DES PERSONNELS


De l’avis de tous, nous vivons une rentrée particulièrement difficile et éprouvante puisque les difficultés liées au contexte sanitaire, comme le port du masque, se trouvent démultipliées par la dégradation des conditions de travail liée à la hausse des effectifs.